
-  C’est un large buffet sculpté ; le chêne sombre,
 -  Très vieux, a pris cet air si bon des vieilles gens ;
 -  Le buffet est ouvert, et verse dans son ombre
 -  Comme un flot de vin vieux, des parfums engageants ;
 
-  Tout plein, c’est un fouillis de vieilles vieilleries,
 -  De linges odorants et jaunes, de chiffons
 -  De femmes ou d’enfants, de dentelles flétries,
 -  De fichus de grand’mère où sont peints des griffons ;
 
-  - C’est là qu’on trouverait les médaillons, les mèches
 -  De cheveux blancs ou blonds, les portraits, les fleurs sèches
 -  Dont le parfum se mêle à des parfums de fruits.
 
-  - Ô buffet du vieux temps, tu sais bien des histoires,
 -  Et tu voudrais conter tes contes, et tu bruis
 -  Quand s’ouvrent lentement tes grandes portes noires.
 
                RIMBAUD Arthur (1854-1891)