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Le Coq et le Renard

vendredi 23 décembre 2011, par Silvestre Baudrillart

  • Sur la branche d’un arbre était en sentinelle
  • Un vieux Coq adroit et matois.
  • "Frère, dit un Renard, adoucissant sa voix,
  • Nous ne sommes plus en querelle :
  • Paix générale cette fois.
  • Je viens te l’annoncer ; descends, que je t’embrasse.
  • Ne me retarde point, de grâce ;
  • Je dois faire aujourd’hui vingt postes sans manquer.
  • Les tiens et toi pouvez vaquer
  • Sans nulle crainte à vos affaires ;
  • Nous vous y servirons en frères.
  • Faites-en les feux dès ce soir.
  • Et cependant viens recevoir
  • Le baiser d’amour fraternelle.
  • - Ami, reprit le coq, je ne pouvais jamais
  • Apprendre une plus douce et meilleur nouvelle
  • Que celle
  • De cette paix ;
  • Et ce m’est une double joie
  • De la tenir de toi. Je vois deux Lévriers,
  • Qui, je m’assure, sont courriers
  • Que pour ce sujet on envoie.
  • Ils vont vite, et seront dans un moment à nous.
  • Je descends ; nous pourrons nous entre-baiser tous.
  • -Adieu, dit le Renard, ma traite est longue à faire :
  • Nous nous réjouirons du succès de l’affaire
  • Une autre fois. Le galand aussitôt
  • Tire ses grègues, gagne au haut,
  • mal content de son stratagème ;
  • Et notre vieux Coq en soi-même
  • Se mit à rire de sa peur ;
  • Car c’est double plaisir de tromper le trompeur.
  • Jean de La FONTAINE (1621-1695)
  • Fables, II, 15

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